Maître Funakoshi Le Dojo-kun
Le Bushido Le Code de Conduite Terminologie

Le Bushido

Bushido signifie littéralement « militaire-chevalier-voies » et pourrait donc se traduire par « les préceptes de la chevalerie de la classe guerrière ». Son apparition serait liée à celle de la féodalité japonaise et des premiers Shoguns à l'époque de Minamoto no Yoritomo (1147-1199) au XIIe siècle. Le Bushido est le code des principes moraux que les chevaliers étaient tenus d'observer.

Le premier Bushido, nommé « voie de l'Arc et du Cheval », fut le premier code non écrit du Bushi. Il débute vers le XIIe siècle et se termine vers le XVIIe. Etabli par une minorité de guerriers habitués à une vie austère et perpétuellement menacée, on y retrouve déjà exaltées des notions telles que la vénération des ancêtres, l'obéissance au souverain, la probité, la résignation face à l'inévitable, le mépris de la mort. En fait, il est plus exacte de parler de voie que de code, car la voie engage la totalité de l'être. Les Bushi formeront bientôt une classe privilégiée et puissante qui gagnera ses titres et sa gloire lors des impitoyables et incessantes guerres intérieures. C'est grâce à cette élite qu’au XIIIe siècle, le Japon se libéra de la menace des Mongoles guidés par Kubilai Khan, petit-fils de Gengis Khan.

Dès le XVIIe siècle ce qui deviendra le Bushido connu ses premières réformes et fut empreint de diverses sources religieuses dont le plus ancien et certainement le plus présent est le Shintoïsme auquel est rattaché le culte religieux de la Patrie et de l'Empereur, le respect de la mémoire des ancêtres, la piété filiale. Au Confucianisme, il dut sa culture littéraire et artistique (Confucius (551-479 avant J-C) accordait un rôle très important à la musique, synonyme d'ordre et d'harmonie) ainsi que la morale sociale des rapports humains dans le cadre de la famille et de la société. Le Bouddhisme a inspiré au Bushido les idéaux de sérénité, d’impassibilité et l’acceptation de l’inévitable. Ainsi le Bushi restait-il insensible au danger et au malheur, car il ne donnait pas plus de valeur à la vie qu’à la mort. Selon le Bouddhisme « l'homme éveillé échappe complètement à la souffrance lors de sa mort». Cet éveil spirituel semble très similaire au Stoïcisme. Le Bushido ne fut officialisé qu'au milieu de ce XVIIe siècle.

La plupart des Samouraïs vouaient leur vie au Bushido, le code strict exigeait loyauté et honneur jusqu'à la mort. Si un Samouraï échouait à garder son honneur il pouvait le regagner en commettant le Seppuku (suicide rituel), que l'on connaît mieux en occident sous le terme de « Hara-kiri ». Cependant, il faut noter une différence non négligeable entre « Seppuku » et « Hara-kiri ». Le Seppuku permettait à un guerrier vaincu de se donner la mort et de pouvoir ainsi mourir avec son honneur (le vainqueur abrégeait ensuite ses souffrances en lui tranchant la tête). Le « Hara-kiri » était une façon de se donner la mort où la personne « perdait » tout honneur suite à ce geste.

Le Bushido moderne débute avec l'ère Meiji en 1868. Avec la modernisation radicale du pays et face à des traités imposés par les américains (convention de Kanagawa de 1854), totalement désarmé, le Japon doit ravaler son immense orgueil et se mettre au diapason de la culture étrangère abhorrée. L’existence des classes sociales fut bannie et les Samouraïs perdirent leur statut particulier qui en faisait des sortes de policiers féodaux, seuls habilités à porter une arme blanche. De nombreux Samouraïs suivirent la réforme et devinrent principalement des dirigeants de l'armée impériale japonaise en cours de formation ainsi que des hommes politiques et plus tard des capitaines d'industries. Ainsi, à la fin du XIXe siècle, de nombreux membres des grandes familles de la noblesse reçurent, sous impulsion du gouvernement, les rênes de ce qui allaient devenir les Zaibatsu, les grands conglomérats industriels et de commerce comme Mitsui, Mitsubishi, Sumitomo, etc. Ces entreprises économiques furent les premières vraies structures capitalistiques modernes du Japon et la colonne vertébrale de l'expansionnisme du Japon de l’ère Showa (du 25/12/1926 au 7/01/1989). Ces dirigeants, anciens Samouraïs, organisèrent leurs entreprises selon les valeurs de leur corpus de référence : le Bushido.

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Le Bushido
D'après le livre d'Inazo Nitobe (1862-1933) : Bushido, l'âme du Japon.

Présentation des 7 préceptes qui ont dirigés la vie des Samouraï.

Un guerrier la définie comme un pouvoir de décision ; « La rectitude est le pouvoir de prendre une résolution selon une certaine ligne de conduite conforme à la raison, sans hésitation : mourir quand il est bon de mourir, frapper quand il est bon de frapper ».
La droiture est un détachement des désirs mesquins et des passions tortueuses, et au-delà une réconciliation avec l'harmonie céleste. Elle est donc cette voie étroite et directe que l'homme emprunte pour tenter de rejoindre le paradis oublié. La rectitude est synonyme de vaillance et tant pis si l'on doit avancer à contre-courant des Us et coutumes en vogue.

Si le sens du devoir se fonde sur la crainte de la réprobation sociale, il est susceptible de dégénérer de manière monstrueuse et irrationnelle, en une sorte de tyrannie inhumaine du sens commun. Ainsi, selon cet artificiel sens du devoir, la mère dans la nécessité devra sacrifier tous ses enfants au premier-né, la fille devra vendre sa vertu pour payer les dissipations du père, et ainsi de suite. Hors de la raison, le sens du devoir devient une monstruosité. Cette raison doit savoir commander en toutes circonstances, loin de toute lâcheté avec un sens aigu et vrai de ce que sont le courage, l'esprit d'audace et la maîtrise de soi.

Le courage consiste à faire ce qui est juste. Se lancer dans les bras de la mort au hasard des chemins n'est pas le vrai courage mais de l'absurde témérité. Le vrai courage consiste à vivre quand il faut vivre et mourir seulement quand il faut mourir. Platon définissait le courage comme « la connaissance de ce que l'homme doit craindre et de ce qu'il ne doit pas craindre ». Il y a ainsi plus de courage à passer pour lâche en refusant de se lancer dans une bataille que l'on juge illégitime qu'à passer pour brave en y mourant.

Les excès, encouragés par la société nipponne trop militaire, a pu rendre cette notion de courage déraisonnablement virile et cruelle. Inazo Nitobe parle de l'éducation spartiate des jeunes garçons, qui dès le plus jeune âge étaient soumis au froid, à la faim, confrontés au labeur et à la solitude pour forger leur endurance et leur audace, tuant dans l'œuf les élans bienfaisants de la nature humaine, alors qu'au contraire la chevalerie devrait tout entière converger vers la bonté et la compassion.

Ces 2 vertus ont toujours été reconnues comme les ornements les plus sublimes de l'âme humaine. Ce sont aussi les qualités fondamentales d'un chef. C'est la seule façon de l'unir à un groupe ou à un peuple qui se vouera à sa cause. Nous retrouverons souvent les plus braves parmi les personnes les plus tendres. D'ailleurs, afin d'éveiller l'esprit de compassion chez les Samouraï, il n'était pas rare qu'ils soient versés ou du moins éduqués dans l'art de la poésie et de la musique.
Attention cependant à la faiblesse d'une charité aveuglée par le manque de sentiment de justice et de droit, que Masamune (1567-1636) résumait ainsi « le droit porté à l'excès se fige en dureté, la bienveillance pratiquée sans mesure dégénère en faiblesse ».

Nitobe nous rappelle qu'il faut l'amour pour oser bien agir, et que cet amour qui dépasse le simple sentimentalisme n'est que plus parfait de porter en lui la justice. Un tel amour, dirigé par l'esprit de justice, connaît la valeur des détresses et celle de la dignité humaine : « Le sentiment du malheur est toujours à la source de toute bienveillance », disait Mencius. C'est pourquoi cet amour est capable de porter un homme à travers toutes les vicissitudes, exaltant ses convictions et ses forces : « La bienveillance emporte avec elle tout ce qui tente de lui faire obstacle, aussi facilement que l'eau domine le feu. Les seuls à douter du pouvoir de l'eau sont ceux qui tâchent de noyer un plein chariot de fagots en flammes avec une tasse de thé. »

La modestie et la complaisance pour autrui, nées du respect qu'on porte à l'autre, furent la racine du sentiment de politesse. Mais elle n'a de valeur que si elle est sincère. A ce niveau elle est très proche de l'amour du prochain.
L'homme poli est celui qui sait « endurer longuement, être bon, n'envier personne, ne pas se venter ni s'enfler d'orgueil, ne pas se comporter avec rudesse, ne pas chercher pour lui-même, ne pas être facilement provoqué et ne pas prendre le mal en compte ».

La politesse s'exprime tous les jours dans de petites actions, souvent à peine perceptibles. Le but n'étant pas l'ostentation de tels gestes, ils doivent être en accord parfait avec soi-même et celui ou celle qui en a reconnu la valeur.

Sans ces 2 vertus, la politesse ne peut exister. Selon Confucius « La sincérité est la fin et le début de toute chose, sans la sincérité il n'y a rien », ceci pourrait être interprété comme : sans sincérité, tout est vide d'humanité, de vérité, de vie, de lumière...

L'honnêteté de l'âme chevaleresque demande de n'attendre aucune autre récompense que le prix tout spirituel de la vertu. La parole du Samouraï « Bushi no ichi gon » avait un tel poids que les promesses et autres n'avaient pas besoin d'être écrites. Même prêter serment était perçu par eux comme un affront à leur honneur.

Cette éthique du Bushido est malheureusement incompatible avec tout système commercial. Les enjeux sont d'un autre registre et le commerçant qui souhaiterait suivre cette éthique se retrouverait rapidement sur la paille à cause de ses pairs. Cependant, aujourd'hui subsiste quelques adages telles « l'honnêteté est la meilleure des politiques » que « d'être honnête, paie » et il est plus que probable que cette sincérité, honnêteté, amène à l'adepte, outre le fait de se sentir « propre », grands nombre de bienfaits et reconnaissance directs et indirects même chez les marchands.

L'honneur est une conscience de la dignité et de la valeur que l'on résout de préserver en soi. Il se conserve et se transmet par le nom, qui devient pour lui un habitacle. Une offense à ce nom est une offense à la dignité de l'homme qui le porte. Le sens du déshonneur était le stimulant suprême pour corriger sa conduite.

La capacité à garder de soi une certaine estime ou à éprouver de la honte est la marque la plus vive et la plus évidente d'une conscience morale. Selon Mencius « La honte est la terre où poussent les vertus ». Un Samouraï, dans sa jeunesse, refusa de laisser entamer sa réputation par une légère compromission: parce que, disait-il « le déshonneur est pareil à une cicatrice sur un arbre que le temps, au lieu d'effacer, agrandit tous les jours ».

Cependant, de nombreuses exactions furent menées par des samouraïs dont le culte maladif de l'honneur dégénéra en susceptibilité belliqueuse et en orgueil. Aux yeux du sage ce manque de bienveillance et de patience pour protéger un honneur mesquin est méprisable. Kumazawa Banzan (1619-1691) nous l’exprime par cette phrase « Quand les autres te blâment, ne les blâme pas, quand ils crient de colère après toi, ne leur renvoie pas leur colère. Songe que tu n'as pas été parfait dans l'accomplissement de ton devoir, et que la félicité ne vient qu'une fois que la passion et le désir ont disparu. »

Inazo Nitobe nous fait remarquer que l'honneur n'est pas une reconnaissance bercée par la flagornerie de la société, mais une estime silencieuse de soi-même pour laquelle on se tient prêt à sacrifier sa réputation aussi bien que sa vie quand en conscience on s'en estime le devoir.

La loyauté est certainement la vertu la plus spécifique de l'esprit nippon car aucune autre civilisation n'a conçu et appliqué cette notion de manière aussi radicale. Au point d'ailleurs, qu'il est difficile pour un étranger de voir dans les applications japonaises de la loyauté autre chose qu'une machine inhumaine et arbitraire à broyer des innocents. Pour illustrer ce propos, Inazo Nitobe reprend brièvement l'histoire d'un enfant qui, afin de protéger la vie du fils de Sugawara no Michizane (845-903), ministre de l'empereur Daigo (885-930) et bienfaiteur du Japon alors exilé et pourchassé, décida de sacrifier la sienne et d'offrir sa tête à la place de celle du petit seigneur. Pour Nitobe ce sacrifice, bien qu'inhumain aux yeux des occidentaux, est beau parce qu'il est libre.

Selon le Bushido, l'ultime loyauté doit malgré tout revenir à l'allégeance la plus large, celle qui engage l'intérêt du plus grand nombre. La loyauté inviolable est donc celle due à la nation (incarnée par l'empereur dans le cas du Japon). L'individu doit ne plus exister que « comme une parcelle du grand corps. »

La loyauté implique la nécessité de tenir ses promesses, remplir ses engagements, être sincère dans ses propres paroles et dans ses actes.

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Le code de conduite du karateka

Meiyo - l'honneur

C'est la qualité essentielle. Nul ne peut se prétendre Budoka (Guerrier au sens noble du terme) s'il n'a pas une conduite honorable. Du sens de l'honneur découlent toutes les autres vertus.

Il exige le respect du code moral et la poursuite d'un idéal, de manière à toujours avoir un comportement digne et respectable. Il conditionne notre attitude et manière d'être vis à vis des autres.

Chujitsu - la fidélité

Il n'y a pas d'honneur sans fidélité et loyauté à l'égard de certains idéaux et de ceux qui les partagent. La fidélité symbolise la nécessité incontournable de tenir ses promesses et remplir ses engagements.

Seijitsu (ou Makoto) - la sincérité

La fidélité nécessite la sincérité dans les paroles et dans les actes. Le mensonge et l'équivoque engendrent la suspicion qui est la source de toutes les désunions.

En karaté - do, le salut est l'expression de cette sincérité, c'est le signe de celui qui ne déguise ni ses sentiments, ni ses pensées, de celui qui se sait authentique.

Yuuki (ou Yuukan) - le courage

La force d'âme qui fait braver le danger et la souffrance s'appelle le courage. Ce courage qui nous pousse à faire respecter, en toutes circonstances, ce qui nous paraît juste, et qui nous permet, malgré nos peurs et nos craintes, d'affronter toutes les épreuves. La bravoure, l'ardeur et surtout la volonté sont les supports de ce courage.

Shinsetsu - la bonté et la bienveillance

La bonté et la bienveillance sont les marques de ce courage qui dénotent une haute humanité. Elles nous poussent à l'entraide, à être attentif à notre prochain et à notre environnement, à être respectueux de la vie.

Ken - la modestie et l'humilité

La bonté et la bienveillance ne peuvent s'exprimer sincèrement sans modération dans l'appréciation de soi-même. Savoir être humble, exempt d'orgueil et de vanité, sans faux-semblant est le seul garant de la modestie.

Tadashi (ou Sei) - la droiture

C'est suivre la ligne du devoir et ne jamais s'en écarter. Loyauté, honnêteté et sincérité sont les piliers de cette droiture. Elle nous permet de prendre sans aucune faiblesse une décision juste et raisonnable.

Sonchoo - le respect

La droiture engendre le respect à l'égard des autres et de la part des autres. La politesse est l'expression de ce respect dû à autrui quelles que soient ses qualités, ses faiblesses ou sa position sociale.

Savoir traiter les personnes et les choses avec déférence et respecter le sacré est le premier devoir d'un Budoka car cela permet d'éviter de nombreuses querelles et conflits.

Seigyo - le contrôle de soi

Cela doit être la qualité essentielle de toute ceinture noire. Il représente la possibilité de maîtriser nos sentiments, nos pulsions et de contrôler notre instinct.

C'est l'un des principaux objectifs de le pratique du Karaté-Do, car il conditionne toute notre efficacité. Le code d'honneur et de la morale traditionnelle enseignée dans le Karaté-Do est basé sur l'acquisition de cette maîtrise.

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Terminologie

Bouddhisme :Le Bouddhisme est, selon les points de vue traditionnels, une philosophie, une spiritualité ou une religion apparue en Inde au Ve siècle avant J.-C. Se référer au lexique (Bouddhisme)

Confucianisme : Le Confucianisme « enseignement des lettrés » est l'une des plus grandes écoles philosophiques, morales, politiques et dans une moindre mesure religieuses de Chine. Elle est l'œuvre attribuée au philosophe Confucius (551-479 av. J.-C.). Se référer au lexique (Confucianisme)

Bushi : (ou Buke) est un terme d'origine sino-japonais signifiant littéralement « guerrier gentilhomme » en japonais.
Bushi et Samouraï sont souvent confondus mais ils correspondent à des périodes et des fonctions différentes. A l'origine, Bushi est le seul nom pour désigner les guerriers japonais. C'étaient des chevaliers en armure dont l'arme principale était l'Arc. Ils étaient chargés de la protection des clans familiaux religieux.
C'est cette proximité avec la noblesse religieuse qui est à l'origine de leur nom de « guerrier gentilhomme ».

Samouraï : Samouraï est un mot japonais désignant un membre de la classe guerrière à la solde d'un seigneur. Se référer au lexique (Samouraï)

Shintoïsme : Le Shintoïsme ou shinto, littéralement « la voie des dieux » ou « la voie du divin », est une religion qu'il est difficile de faire rentrer dans des catégories. Elle mélange des éléments polythéistes et animistes. Se référer au lexique (Shintoïsme)

Stoïcisme : Le Stoïcisme est une école philosophique de la Grèce antique, fondée par Zénon de Cition (335-261 Avant J.C) en 301 av. J.-C. Se référer au lexique (Stoïcisme)

Shogun : Le terme Shogun est l'abréviation de Seii Taishogun que l'on peut traduire par « grand général pacificateur des barbares ». Se référer au lexique (Shogun)

Zaibatsu : Définit un grand groupe d'entreprises japonaises, présent dans presque tous les secteurs de l'économie. Se référer au lexique (Zaibatsu)

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